jeudi 26 janvier 2023

La fin du cash en Belgique ?

 Editorial d'Anne Vanderdonckt, directrice de la rédaction de "Plus Magazine" :

Je me souviens de ma mère faisant la queue à la banque pour retirer "l'argent des courses". Ce qui, pour elle, ne représentait pas uniquement une corvée. Vers le premier du mois, les femmes au foyer, relativement isolées entre leur ménage et le soin aux enfants, en profitaient pour socialiser, alignées devant les guichets tous ouverts. Les employés de l'agence participaient à la conversation. Les gosses finissaient par aller jouer dans l'ombre moderniste des buildings Amelinckx sur le parking du GB attenant. Je ne dis pas que c'était mieux ou moins bien, juste différent.

Puis, sont arrivés, parfois très tard dans certains endroits (on évoque 2009 dans un patelin à deux jets de pierre de la capitale), les distributeurs de billets. Le premier automate belge s'est implanté boulevard Anspach, au centre de Bruxelles. C'était en 1968, l'année où Mai a tout bousculé. Suscitant la méfiance qu'on accorde généralement à la nouveauté et à l'automatisation, ces distributeurs étaient sans doute pourtant bien moins faillibles qu'un humain qui souffre de maux d'estomac et vient de se faire engueuler par son chef.

Aujourd'hui, le liquide disparaît au profit de l'argent dématérialisé qui "sort" de nos cartes ou de nos smartphones. Une notification me prévient sur mon application bancaire : "Vous avez sorti 200 euros en liquide". Je reconnais à la fois le ton donneur de leçons des app santé :  "Vous avez fait moins de pas qu'hier". Et celui, comminatoire, de l'app de la maison :  "Fenêtre salle de bains ouverte, alerte". Fliqués, nous sommes. Jusqu'à ce que nous avons de plus tabou :  nos sous.

Les agences bancaires, avec leurs employés aux défauts insupportables et aux qualités peu reconnues, sont de moins en moins nombreux, on le sait. Le raisonnement :  peu s'y rendent encore, vu que leur ordi fait confortablement le job, 24h sur 24. Comment ne pas comprendre cela ?

Mais voilà que les automates, eux aussi, ferment tout doucement leurs clapets argentés. Ils étaient 8.750 en 2015. Ils sont 4.000 aujourd'hui. Ils seront 2.200 en 2025. Où aller chercher des sous ? Car votre médecin ne dispose pas nécessairement d'un lecteur de cartes, il y a les pourboires, le shopping sans carte bancaire pour les drogués du shopping, il y  a aussi le sentiment de sécurité que vous donnent 100 vrais euros dans votre portefeuille. Et les gamins qui vous vendent des chocolats pour financer leur voyage scolaire, vous leur avez demandé s'ils prenaient Payconic, vous ?

D'après une enquête de la Banque centrale européenne, ce sont les Belges qui râleraient le plus contre la disparition de l'argent concret. Des gens de tout âge. Non, pas nécessairement pauvres. C'est ce qu'on appelle la fracture numérique. Qui touche pas loin de la moitié des Belges...

Anne Vanderdonckt, directrice de la rédaction de "Plus Magazine"

Et vous, qu'en pensez-vous ? 

jeudi 19 janvier 2023

Johan Bonny, l'évêque progressiste d'Anvers

                           


Peu connu au sud du pays, c'est pourtant l'évêque le plus progressiste de Belgique. Né en 1955, Johan Bonny a été ordonné prêtre en 1980, et nommé évêque d'Anvers en 2008. Et depuis 15 ans, il a pris publiquement position en faveur des homosexuels, à contre-courant du discours du Vatican. 

Après la tenue d'un synode sur la famille à Rome en 2014, il a fait des déclarations dans les médias pour souhaiter que l'Eglise se mette en phase avec l'évolution de la société, et accepte l'homosexualité (ce qui lui vaudra ensuite un prix de l'association des organisations LBGT flamandes).

En 2021, alors qu'il assume le remplacement de Jozef De Kesel (en congé de maladie) à la tête de l'Eglise de Belgique, Johan Bonny s'excuse publiquement auprès de la communauté homosexuelle après avoir pris connaissance d'un nouveau texte de la Congrégation pour la doctrine de la foi considérant l'homosexualité comme un pêché. Sa phrase "J'ai honte par procuration pour mon Eglise"   fait le tour des médias.

En 2022, les évêques flamands de Belgique nomment Willy Bombeek (laïc et homosexuel) comme coordinateur interdiocésain en charge de la pastorale des homosexuels, et publient un texte de trois pages avec des prières à destination des conjoints homosexuels (vu que l'Eglise refuse toujours de les bénir et de les marier).  Officiellement, l'évêque Johan Bonny n'a pas été désavoué par le Vatican. 

Concernant le célibat des prêtres, l'évêque d'Anvers Johan Bonny a également fait une déclaration fin 2022 qui n'est pas passez inaperçue :    "Il y a deux semaines, nous avons passé, avec les évêques belges, deux heures avec le Pape, parlant entre autres de l'abolition de l'obligation du célibat. Cette question est devenue négociable et quelque chose est sur le point de se produire. Dans notre diocèse d'Anvers, nous avons cinq prêtres mariés :  un Biélorusse, deux Ukrainiens et deux Chaldéens. Il y a des discussions pour porter cette décision devant un autre niveau d'autorité. Le Pape est pris entre deux mondes :   vous ne pouvez pas lui demander de dire oui ou non. Il ne pourra jamais bien faire. C'est pourquoi nous préconisons que son autorité pour abolir le célibat obligatoire des prêtres soit supprimée et confiée aux conférences épiscopales, afin qu'elles puissent décider, pays par pays, région par région, ce qui est nécessaire pour garder les gens dans l'Eglise. Ce n'est qu'alors que nous pourrons sortir de cette impasse. Et le pape François est définitivement ouvert à ça".

En 2023, le Vatican va devoir décider le nom du nouveau chef de l'Eglise catholique belge. Reste à voir si les prises de position très progressistes de l'évêque d'Anvers Johan Bonny jouent en sa faveur ou en sa défaveur...