vendredi 30 janvier 2009

Le futur Musée René Magritte à Bruxelles

A quelques mois de l'inauguration du futur Musée René Magritte à Bruxelles, Charly Herscovici a accordé cette semaine une longue interview au magazine français "Point de Vue" :

"Racontez-nous comment a pu naître un tel projet.
- L'aventure remonte à une quinzaine d'années. Après avoir parcouru le monde dans tous les sens et initié de grandes expositions de New York à Tokyo, je me suis rendu compte qu'il y avait un potentiel énorme pour Magritte et qu'il était temps d'amorcer la création d'un lieu qui lui soit entièrement consacré.
- Pourquoi est-ce que cela a pris tant de temps?
- Parce qu'il fallait mettre tout le monde d'accord! En Belgique, rien n'est simple, la culture est partagée en trois (flamande, francophone et bruxelloise). Magritte unit nos cultures, mais l'idée d'un musée ne faisait pas l'unanimité, certains ne comprenaient pas pourquoi on devait privilégier Magritte plutôt qu'Ensor par exemple, ou pourquoi il fallait que cela se fasse forcément à Bruxelles.
- Qu'est-ce qui a été le déclic finalement?
- J'ai trouvé le bon interlocuteur à travers Michel Draguet, directeur général des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Il m'a proposé ce bâtiment qui est idéalement situé sur la place Royale et j'ai aussitôt accepté. Nous sommes allés ensuite voir le groupe Suez et ils ont été d'accord pour financer les travaux. Ils ont signé un chèque de quatre millions et demi d'euros, ce qui est une opération de mécénat sans précédent.
- Le plus difficile n'était-il pas de convaincre les musées de se dessaisir des toiles de Magritte qu'ils possédaient?
- Oui, il a fallu négocier pour que les Musées Royaux acceptent le principe de tous les réunir en un seul endroit, ce qui était le bon sens même. Au Musée d'Art Moderne, il y a cent cinquante oeuvres, dont quarante-huit toiles, mais dans la salle dite Magritte, on en voit à peine une vingtaine.
- Combien y en aura-t-il dans le nouveau musée?
- Deux cent dix tableaux, dont une soixantaine confiés par des collectionneurs, plus un nombre important de dessins et de documents que je prête et qui sont inédits, comme des collages faits par Magritte ou le press-book de ses articles annotés de sa main.
- Des choses dont vous aviez hérité à la mort de la veuve de Magritte?
- Pas exactement. Lorsque Georgette décède en 1986, il y a un testament où figurent quatre légataires : les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, le Centre Pompidou, le Musée des Beaux-Arts de Charleroi et moi. Chacun hérite d'oeuvres et pour ma part, j'hérite des droits intellectuels, c'est-à-dire le droit de reproduction et le droit moral.
- Cela signifie que si un Japonais veut faire une carte postale avec un tableau de Magritte, il doit passer par vous et vous touchez un pourcentage?
- Absolument, mais mon rôle est passif. Je ne suis pas sur le terrain, il y a des gens pour çà, je ne m'occupe pas du côté commercial.
- Qui s'occupe du commerce alors?
- Il y a des sociétés d'auteurs, comme l'ADAGP, qui gèrent cela. Mais je ne dis pas que cela ne rapporte pas d'argent, c'est ce qui me permet d'être libre et de faire vivre la fondation.
- La fondation?
- En 1998, j'ai créé la Fondation Magritte pour promouvoir son oeuvre à travers le monde et fixer les choses dans le temps. Si je venais à disparaître, ce but serait poursuivi et encadré. Avant, je ne m'occupais que de la succession.
- Comment aviez-vous connu Georgette Magritte?
- Je l'ai rencontrée à la fin des années 70 à une exposition Magritte au casino de Knokke-le-Zoute. J'avais 17 ou 18 ans. On a échangé quelques mots et sympathisé. Je lui ai rendu visite dans sa maison et peu à peu une relation amicale s'est installée. Lorsqu'elle s'est séparée de son secrétaire, elle m'a proposé naturellement de l'aider. Il n'y avait pas de contrat entre nous. A l'époque, j'étais étudiant en économie et seul comptait le plaisir d'être dans cette maison qui n'avait pas bougé depuis la mort de Magritte en 1967. Peu à peu, elle m'a donné des responsabilités, j'ai géré les relations avec les musées, les collectionneurs.
- Vous vous souvenez des toiles qui étaient alors dans la maison?
- Parfaitement. Dans le salon trônait "La magie noire". Au-dessus du canapé, il y avait "Le domaine d'Arnheim", et au-dessus du secrétaire "La page blanche", le dernier tableau achevé de Magritte. De chaque côté d'une commode, "L'incendie" et "L'île au trésor", au-dessus du piano "Le prêtre marié", le portrait de Georgette était dans la chambre à coucher, et "Le galet" dans le boudoir qui lui servait d'atelier.
- Comment avez-vous appris que vous héritiez?
- A la mort de Georgette en 1986, le notaire m'a téléphoné et m'a donné lecture de la clause qui me concernait. Ce fut une vraie surprise, elle ne m'en avait pas du tout parlé.
- Il n'y avait pas d'autres héritiers?
- La nièce de René Magritte pensait avoir quelque chose, mais Georgette avait hérité de tout à la mort de son mari. Dans leur contrat de mariage était précisé "au dernier vivant tous les biens". Les deux frères de Magritte avaient essayé de récupérer quelque chose, sans succès, la nièce de René n'a donc rien eu quand Georgette est décédée. Mais pour ce qui n'était pas dans le testament, des oeuvres qu'elle voulait donner de la main à la main à des proches, on a cherché des héritiers légaux, et des arrière-arrières-cousins de Georgette se sont retrouvés du jour au lendemain propriétaires de toiles de Magritte! Cela a fini en vente chez Sotheby's à Londres...
- J'imagine que ce testament ne vous a pas fait que des amis?
- Les gens ont été très durs avec moi. J'ai tout entendu. Hériter quand on a 28 ans, c'est grisant mais on a la terre entière contre soi. J'ai reçu des lettres d'insultes, des photographes me traquaient dans la rue, on m'a traité de tous les noms...
- Comme gigolo?
- Entre autres. Heureusement, j'ai eu le soutien de quelques amis de Magritte et de sa femme. Ils m'avaient vu au fil des années et ils m'ont aidé. J'ai ainsi pu compter sur les conseils de leur avocat Harry Torczyner jusqu'à sa mort en 1998.
- Combien y a-t-il de Magritte à travers le monde?
- 1200 toiles dont 40% en collections privées : Paul Mc Cartney en a 25, Daniel Filipacchi une vingtaine, le baron et la baronne Roland Gillion-Crowet 8, le baron Albert Frère 5.
- Y a-t-il beaucoup de faux?
- Oui. Deux fois par an, à la fondation, un comité d'experts se réunit pour authentifier des oeuvres et sur la cinquantaine examinée, 80% sont fausses! Il y a même une école de faux en Italie!
- C'est la rançon de la gloire?
- Oui. Avec Matisse, Picasso et Warhol, Magritte est l'artiste le plus connu mondialement car ses tableaux sont forts, immédiatement reconnaissables".

7 commentaires:

Edmée De Xhavée a dit…

Je n'étais pas au courant, mais c'est vraiment une idée excitante! Bravo...

jean.botquin a dit…

Bonne nouvelle! Un musée Magritte comme le musée Picasso à Paris ou le musée Van Gogh à Amsterdam

alain a dit…

j'adore Magritte et ne manquerai pas d'aller à Bruxelles dans l'année

Angélita a dit…

Bonjour, Cela n'a rien à voir avec l'article.
Merci pour ce long commentaire sur le blog jelis.
Un petit travail en plus que je vais vous demander, dans quelles catégories (romans, nouvelles, histoires,...) range-t-on tous ces livres ?
Sans reprendre les titres car cela prendra du temps mais en numérotant.
Merci beaucoup , nous allons nous en occuper.

Louis a dit…

En voilà une bonne nouvelle... Un musée Magritte !

De quoi encore attirer quelques touristes. Décidemment, notre petit pays fait encore parler de lui et en bien !

Contemporary art Paris rock painting a dit…

Hommage à René Magritte :
http://boucherieart.free.fr/art_contemporain/pages/magritte_art_concept.htm

Anonyme a dit…

Hello,nice post thanks for sharing?. I just joined and I am going to catch up by reading for a while. I hope I can join in soon.