jeudi 5 juin 2008

Hommage à l'écrivain Hugo Claus

Voici l'hommage rendu par Jean-Luc Outers à Hugo Claus (1929-2008) dans l'éditorial du périodique bimensuel et gratuit "Le Carnet et les Instants" :

"Pourquoi le portrait d'Hugo Claus en couverture de notre périodique voué aux lettres belges de langue française? Ecrivain flamand, géant de la littérature (son nom fut souvent cité parmi les favoris du Nobel), Hugo Claus était universel. Profondément attaché à la Flandre, il l'a pourtant malmenée, ses politiques, son clergé, cette mentalité de bien-pensants pétrie de certitudes et d'hypocrisies. "Deux choses préoccupaient le ministre ce jour-là, son poids et la mort" : tel est l'incipit de son roman "Belladonna", tout un programme. Mais il y revenait sans cesse malgré ses exils à Amsterdam, à Rome, en Provence et ailleurs. Il avait quelque chose de Thomas Bernhard - autre enfant terrible de la littérature européenne - qui était profondément autrichien et universel. Sinon que le premier jouissait de chaque instant de la vie et que le second était un être de souffrance, tous deux nourrissaient pour leur pays une sorte d'amour-haine. Claus haïssait le nationalisme, parce qu'il haïssait la pureté. La seule idée de purification ethnique le faisait vomir. Homme d'ouverture, il paraissait partout chez lui, il parlait plusieurs langues dont le français admirablement avec cette pointe d'accent qui donnait à la langue française la saveur d'un idiome qui semblait venir d'ailleurs. La dernière fois qu'on vit sa photo à la une des journaux, ce fut le lendemain de la déroute électorale du Vlaams Belang à Anvers qui, à coup de slogans poujadistes, s'était fait fort de conquérir l'hôtel de ville. Le photographe l'avait surpris assis à une terrasse ensoleillée d'un bistrot, trinquant avec ses amis, la chope levée en signe de victoire. Ce fut la dernière image. Je me suis souvent demandé s'il n'y avait pas deux Flandres, celle que l'on connaît, nationaliste, repliée sur elle-même, et celle de ses artistes admirables qui savent que la culture, c'est l'abolition des frontières à travers les ponts que l'on jette. Hugo Claus était de ceux-là. Dans le contexte belge mais aussi européen (car la résurgence des nationalismes est européenne), il était irremplaçable. Sa voix s'est éteinte. Elle nous manquera terriblement".
Jean-Luc Outers.

Petit sondage subjectif : après le décès d'Hugo Claus, qui est, selon vous, le plus important auteur belge vivant?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bravo pour cet article émouvant.C'est vrai qu'Hugo Claus était un bon belge,mais le jour de sa mort,les médias néérlandophones (le terme "flamand" me répugne)en ont parlé uniquement en tant que "vlaamse auteur" en passant sous silence son engagement politique.Il est vrai qe si une prise de position habituellement francophone est prise par un néérlandophone,elle devient gênante.C'est d'ailleurs pour ça que Rudy Aernoudt s'est fait virer.