jeudi 12 avril 2018

Premier film de Jérémie et Yannick Renier

"Carnivores", c'est le premier film des frères belges Jérémie et Yannick Renier qui est actuellement au cinéma. Il raconte l'histoire de deux sœurs. Voici la bande-annonce :   https://www.youtube.com/watch?v=oGGKIrcR32E

Jérémie Renier a répondu aux questions de la presse :

"Si vos rapports avaient été aussi compliqués avec votre frère Yannick, vous n'auriez sans doute pas réalisé ce film ensemble. Alors, d'où vient le scénario?
- Ca vient d'abord d'une envie de travailler ensemble. Il y a plusieurs années, nous avons tourné dans un film de Joachim Lafosse et nous avions pris beaucoup de plaisir à imaginer des choses, à parler des séquences. Par ce qui nous reliait, j'ai ressenti qu'il y avait des choses à faire. Alors, nous sommes partis de ce que nous avions traversé. Ce sujet nous semblait intéressant. Et très vite, nous avons eu envie de sortir de l'anecdote et de ce que nous avions vécu pour pouvoir en parler au plus grand nombre en posant des questions telles que : que se passe-t-il au sein d'une fratrie, au sein d'une famille face aux désirs de chacun? Qu'est-ce qui crée l'animosité, la jalousie, les frustrations?

- Vous êtes donc passés par là. Comment avez-vous traversé cette rancœur, cette jalousie de manière si positive?
- Avec mon frère, nous avons pu parler.... Le film raconte l'histoire de deux sœurs qui s'aiment mais par ce qui leur arrive dans la vie, en fonction de comment on les positionne l'une par rapport à l'autre, des rancoeurs naissent et une blessure interne se crée. Dans le film, nos personnages n'expriment pas, ne parlent pas de ce qu'elles ressentent. Nous avons fantasmé et eu envie d'aller jusqu'au bout de ce qu'il se serait passé si nous n'avions pas dialogué, mon frère et moi.

- L'envie de vous mettre dans la peau d'un réalisateur était-elle là avant l'envie d'être comédien?
- A l'époque, mon père avait une caméra et je passais mes week-ends à faire des petits films, sans prétention de les montrer mais j'avais l'envie de raconter des histoires, d'essayer des choses et de les mettre en images. J'ai continué dans l'ombre jusqu'au jour où c'est devenu primordial et important de pouvoir l'exprimer. En réalisant ce film avec mon frère, j'ai eu le sentiment d'être là où je devais être depuis longtemps. Un peu comme quelque chose se cristallisait et j'ai pris du plaisir à chaque étape de la production, c'était très jouissif.

- Ce projet de film n'est pas neuf?
- Non, ça fait longtemps que le projet existe, mais nous avions besoin de nous confronter à nos propres démons, de prendre du recul. Et puis il a fallu trouver le temps de se retrouver dans l'écriture.

- Pour des comédiens, a-t-il été difficile de rester derrière la caméra? Vous êtes-vous interdit de jouer dans votre propre film?
- Non, pas interdit...  Au tout départ, nous avions pensé jouer également. Et puis, ce projet était déjà tellement personnel et égocentrique. Nous avons eu envie de raconter une fable, une fiction qui nous dépassait, Yannick et moi.

- Dans le film, il y a une scène très violente entre les deux sœurs. En substance, l'une dit à l'autre qu'elle n'est rien, car elle n'a pas d'enfant, pas de mec, pas de carrière. Ca reflète assez bien notre société où pour exister, il faut tout cela. Pourtant, comme on le voit dans le film, ça ne mène pas à la sérénité?
- En effet, on a besoin de se combler de plein de choses pour imaginer être heureux. Et c'est de là que naît la frustration parce que l'autre a des choses que l'on n'a pas... On imagine pouvoir être heureux jusqu'au moment de la plénitude où on se rend compte que c'est à nous de décider d'être heureux, quoi qu'il se passe et où qu'on soit. C'est difficile dans notre société d'accepter que des gens qui en apparence ont tout peuvent aussi être malheureux. 

- Le personnage de Sam est dépassé dans tous les rôles de sa vie (épouse, mère, comédienne). Est-ce que ça vous est arrivé?
- Le scénario est parti de nous, que ce soit mon frère ou moi...  Nous avons tous à un moment donné dans notre vie des questions : est-ce que je suis vraiment heureux, là où je suis? Est-ce que ce que j'ai mis en place me remplit vraiment? 

- Vous avez été père très jeune, vos fils ont 12 et 17 ans. Quel genre de père êtes-vous?
- Il faudrait poser la question à mes enfants...  J'essaie d'être un père à l'écoute, conciliant tout en donnant des bases qui sont les miennes. Je pense que le dialogue est primordial. J'ai eu la chance d'avoir des parents qui ont toujours été dans le dialogue, malgré mes erreurs, mes conneries. J'essaie de reproduire cela car ça m'a permis de me remettre en question. J'essaie de les pousser vers ce qui les anime, et puis leur donner de l'amour et du temps.

- C'est difficile de concilier vie privée et vie professionnelle quand on peut s'absenter dix semaines pour un tournage?
- Ce sont des métiers de saltimbanques. C'est déstabilisant de vivre en autarcie avec une équipe lors d'un tournage. Tu es un peu en dehors du temps, alors c'est important d'avoir des bases solides et de savoir qui tu es. Les premiers tournages, c'était une parenthèse enchantée et je mettais beaucoup de temps à revenir à la réalité. Cela dit, c'est comme quand on voyage, quand on revient, il faut se réadapter... Et un film, il faut le voir comme un voyage....".

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Ce film me tente, j'aime quand on aborde les relations dangereuses ou étranges qui sont sous les apparences. Je trouve ce thème extrêmement intéressant!